Rachid Koraïchi - La rencontre
“La mémoire des artisans du monde”
Parmi les métiers qui “ont la vie dure” aujourd’hui dans le contexte inquiétant de la mondialisation, les artisans sont en première ligne. Et pourtant, ils sont la mémoire du monde . Sans eux, il n’y aurait ni traces du passé, ni jonction vers l’avenir.
Pour parler de ces compagnons qui se transmettent les clés de leur savoir à travers les générations, quel meilleur fil conducteur qu’un artiste, appelé à élaborer son œuvre en utilisant leurs compétences multiples, en symbiose et à l’écoute de chacun d’entre eux ?
Soie et indigo
Film Documentaire : 35 minutes
Réalisation : Philippe Troyon
Montage : Mélanie Dupas
Production : Périphérie - Imaginem
La rencontre avec Rachid Koraïchi
J’ai rencontré Rachid Koraïchi, à l’occasion d’un travail qu’il a mené dans la cité Montillet du Sud Blanc-Mesnil avec un chorégraphe, Haïm Adri. Les habitants traumatisés par la reconstruction de leur cité ont été invités à tisser leur mémoire sous la forme de plusieurs “tapis de salon” (comme ceux qui flottent à leurs balcons).
Rachid a conçu le tapis de départ comme matrice : 21 tapis en toile de lin (2m10 x 2m80) marouflées sur du papier. Il y trace dans sa calligraphie personnelle et symbolique, couverture ,radio, vélo, fauteuil, pipes …autant de symboles représentant l’intime objet du déménagement à ne jamais oublier.
J’ai été surpris par la générosité de cet homme qui mélange son art avec des personnes modestes qui ont besoin d’exprimer à leur façon quelque chose de leur cœur.
7 variations autour de l’indigo
Exposition, à Marseille, Galeries de la Vieille Charité.
J’ai filmé son projet de Marseille en 2002. [Entretien et Exposition]
Il a créé une installation autour de la soie à l’hospice, la Vieille Charité, lieu chargé d’un passé humaniste, qui recueillait l’argent de la population pour accueillir les démunis, et les marins sans abri. Il est allé en Syrie, à Alep où il a fabriqué avec les artisans de là-bas les soieries et les tampons.
Il était venu chercher l’inspiration dans cette cité vieille de plusieurs millénaires. Alep au nord de la Syrie. Comme les couleurs voyagent, il voulait retrouver des traces de bleu sur cette route de l’Inde d’où venait l’indigo. Car en Alep, au fil des siècles, cette teinture avait été l’objet de nombreuses études dont certains secrets furent peu à peu révélés : indigo mêlé d’écorce de grenade avec addition d’eau de dattes ou de suc de raisin noir broyé ou de figues piétinées. Ces macérations étranges conféraient à l’indigo d’Alep une haute réputation dans toute la Méditerranée, Rachid Koraïchi souhaitait aussi acquérir de la soie, chiner de ces tampons anciens que les imprimeurs de tissu utilisaient encore au début du XXe siècle. Il les mêlerait aux siens qu’il allait créer ici, inspiré, comme nulle part ailleurs, par les étoffes imprimées.
Comme tout ce qui devient une œuvre en création, il se met alors en route dans le monde, à la recherche de lieux chargés de vibrations et de rencontres avec d’autres gens, et d’éléments qui vont nourrir son travail.
A partir du fil de soie, il construit la trame du projet à son niveau de spiritualité. Il s’inspire de la vie d’une femme pauvre, Rabi’a, qui, dans le désert d’Irak, est devenue l’initiatrice de la mystique musulmane. La soie, c’est le féminin. A la Vieille Charité, ces banières de soies seront comme un livre ouvert à tous, en l’honneur de cette femme et du féminin.
“Désormais, ton amour est mon but et mon délice, la splendeur de l’œil de mon cœur assoiffé…”
L’écriture
Rachid Koraïchi a inventé une écriture. Son écriture.
Le voyage intime et le voyage dans le monde
Le travail de Rachid Koraïchi
Rachid Koraïchi, plasticien, axe son travail sur le chiffre “ 7 ” depuis tant d’années... comme une prière. Ce chiffre très symbolique, porte en lui une valeur sacrée [7 jours de la semaine, 7 pétales de la rose, 7 degrés de la perfection, 7 marches de l’arbre cosmique et sacrificiel du chamanisme…]. “C’est le symbole qui unit les êtres, le symbole d’une totalité.” Il a fait sien ce chiffre comme le plus petit dénominateur commun, indispensable à sa créativité, à sa pensée, à sa recherche spirituelle. Sa vie est liée à ce chiffre. Il est né le 20.1.1947 qu’il se plait à traduire en de savantes combinaisons mathématiques réductibles au chiffre sept.
PROJET : "MEMOIRE DES ARTISANS DU MONDE"
EDITIONS
Livre : Couleurs de l’invisible
Livre : Sept variations autour de l’indigo
Livre : Rachid Koraichï